jeudi, juin 30, 2005

LES HUMEURS DE JADE:
A une passante

Les Humeurs de Jade:Tous ces petits riens qui m'irritent, toutes ces grandes choses qui m'emmerdent. Tout, enfin, ce qui empêche le lézard vert de lézarder inoffensivement dans son antre en fredonnant tranquillement l'air de sa dernière ritournelle intérieure (en ce moment, c'est LOG OFF de Kenji Kawai (tiré de la BOF du film Avalon)).

Texte écrit en Septembre 2000.

Ce matin, je me suis rendu, comme beaucoup de monde, à mon lieu de travail. Dans le RER, au détour d'un escalier de correspondance, une pièce tinte sur le bitume. Devant moi, une jeune femme pressée vient de perdre une pièce de un franc. Elle grimpe les marches deux par deux laissant la pièce derrière elle comme un juilletiste laisse son chien sur le bord de l'autoroute. Pas galant pour un sou, mais malgré tout honnête, je ramasse la pièce et court dans mon croisé pour la rattraper. Arrivée à la sortie, elle s'arrête pour insérer son titre de transport dans le composteur automatique de sortie. Je lui pose gentîment la pièce sur la machine en lui disant: "Vous avez perdu un franc." Elle prend la pièce et sort de l'enceinte sans un regard pour moi, sans un mot de remerciement. Sortant de l'enceinte et sans doute un peu de mes gonds, j'ai failli au moment où je l'ai dépassée lui crier: "Un merci, çà t'écorcherait la bouche!?!?" et puis je me suis contenu et j'ai passé mon chemin sans lui jeter un regard.

Et depuis je m'interroge? Les Parisiens sont-ils devenus handicapés sociaux sans que je ne m'en aperçoive? Avait-elle peur de moi? Je n'avais pourtant pas une gueule de loubard: en costume croisé (sans cravate d'accord, mais enfin?) A-t-elle cru que je voulais la draguer? (Rien que l'idée me fait rire!) Ou alors était-elle une utilisatrice occasionnelle des transports en commun, une pauvre conductrice dont la voiture est à sec et qui devait se rendre au travail avec le... """peuple""" et qui de ce fait était trop terrorisée ("Si vous saviez!!! Il y a des Viols dans ces endroits là!), ou trop snobe! (Ou même les deux en ce mélange ignoble où l'inconnu fait le mépris et la peur et en conséquence, le racisme).

Ou alors ce petit incident n'est qu'un symptôme de ce qui se passe dans le métro: froideur générale, pas de relationnel, pas de contacts humains (sauf physiques quand il y a trop de monde, et même alors, on ne reconnaît la présence de l'autre que parce qu'il vous écrase le pied de sa rangeos ou vous exhale ses émanations toxiques (de bouche, de cinq heures voire pire: de crasse) à la figure). Le métro parisien est peut-être parsemé d'abrutisseurs émotionnels installés par le pouvoir ou tout autre organisme persuadé que l'abrutissement et domination des masses vont de paire.

Finalement, ils n'y a plus que les mendiants qui veuillent faire du relationnel dans le métro parisien: "J'ai un(e) (voire deux) enfants à charge.", "J'ai perdu mon emploi et mon logement.", "J'ai faim.", voire encore "Che fiens tu Koshovo." Ce sont les seuls qui parlent, les seuls qui tentent de communiquer. D'autres proposent un "Réverbère", un "Coin de rue" ou autre journal de mots fléchés. Les derniers jouent de la musique, chantent en tendant leur sébille... J'en ai croisé deux dans le train de banlieue qui me menait au bureau. Et laissez moi vous dire qu'elles savaient chanter!!! J'ai regretté à ce moment-là ne pas avoir gardé cette pièce de un franc: là au moins, on m'aurait dit "Merci."

2 commentaires:

Anonyme a dit…

Une fois, sur un quai de métro, j'ai rendu son gant à une damoiselle qui l'avait laissé tomber... Elle a été terrorisée que je l'aborde et a poussé un cri ! Elle m'a quand même dit merci. Je ne savais pas que je pouvais faire peur...

Anonyme a dit…

Fichtre ! Je suis retombé ici par hasard, ai relu cet article par hasard sans me souvenir que je l'avais déjà lu, et je m'apprêtais à y re-déposer exactement le même commentaire que le précédent... C'est effarant !!!

Robbie